SEPT
mois de préparation
L'idée
de participer prend forme vers le mi janvier avec les premiers articles de
presse (mais cela fait 8 ans que j'y regarde avec à chaque fois d'autres
priorités : travaux maison, conseil municipal,…)
N'ayant
jamais fait plus de 300 km au cours d'une même épreuve, le projet me parait
ambitieux mais le défi me tente. Je décide donc de participer, pas à pas, aux
brevets qualificatifs (200, 300, 400, 600 km) et de voir après chacun d'entre
eux ou j'en suis, l'inscription ne pouvant se faire qu'à l'issue de ces brevets
qualificatifs.
Voici
quelques unes des dates clés de ma préparation
15
mars
brevet 100 km de Niort 22
mars
Cholet Pays de Loire 185 km 30
mars
brevet de 200 km à Ruelle 12
avril
la Bernard Bourreau 165 km 27
avril
Brevet de 300 km à Niort 3
mai
La Bossis 165 Km 17
mai
brevet de 400 km à Niort 14
juin
brevet de 600 Km à St Georges les Baillargeaux 21
Juin
L'ardéchoise 210 km 4
au 8 août
semaine fédérale d'Aurillac 600 km
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18
- 22 Août : PARIS - BREST - PARIS
Je rallie Paris, tranquillement, en camping car. Sur place je part en reconnaissance. |
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C'est
l'effervescence qui s'installe autour du village accueil, les vélos se
font de plus en plus nombreux. Il
faut d'abord se soumettre au contrôle des machines (conformité éclairage,
solidité des portes bagages, …), puis prendre possession de son carnet
de route avec le badge magnétique (tiens on se croirait au travail). Ensuite installation au camping de St Quentin pour attendre, le plus tranquillement possible, le départ du lundi soir. |
Les téléphones portables ont fonctionné. Je retrouve les collègues, avec qui j'ai effectué les derniers brevets qualificatifs. Guy, et Anne-Marie de La Rochelle, et Loïc de La Tremblade. Nous décidons de partir ensemble pour l'aventure. L'union fait la force! |
Nous rejoignons le sas de départ. Au passage nous assistons au dernier départ des concurrents du 80 heures. |
L'attente est interminable dans le flot des concurrents. Le départ de 22 h est le plus important en nombre d'inscrits. Pointage de départ, constitution des groupes de 500 qui s'élanceront de 1/4 heure en 1/4 heure. |
Les partants Départ de 20 heures : 960 |
Le nombre des partants s'élève à 4033. |
c'est
le départ, nous avons réussi à nous glisser dans le premier groupe.
Plus de 500 personnes sont massées sur la ligne de départ pour nous
applaudir et égrener le compte à rebours : 10, 9, 8, 7, 6, 5, 4, 3, 2,
1, 0 Trompe
de brune et musique bretonne au biniou. C'est parti dans une chaude
ambiance. A vive allure, des motos nous accompagnent sur la voie rapide. Il fait nuit, mais à chaque carrefour, la population est présente pour nous applaudir et nous encourager. |
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L'allure
est rapide, trop rapide à mon goût. Il faut être prudent, surveiller à
droite, à gauche, faire attention aux plaques d'égouts et nids de poule,
s'assurer que les 3 autres compagnons d'échappée sont toujours là, éviter
les éclairages qui n'ont pas résisté aux trépidations des premiers km
et qui jonchent la route. Ce serait stupide de mettre prématurément un
terme à son défi. Pendant les 3 premières heures c'est toujours cette allure rapide qui prédomine. Des groupes partis plus tard, nous rejoignent et nous dépassent. On se croirait parti pour un cyclosportive et pourtant il reste encore plus de 1000 km à faire. |
Arrêt
ravitaillement à Mortagne au Perche. Il n'y a pas de pointage ici, à
l'aller. Sur
le Km qui précède l'arrêt, tous les véhicules suiveurs sont stationnés
à touche-touche et attendent leurs protégés. Les tables de camping sont
sorties et les réchauds font cuire les pâtes . Pour
ceux comme moi qui sont partis en totale autonomie, c'est le passage par
les selfs services pour se restaurer. Et là premier désagrément, il
faut faire la queue à tous les postes : restaurant, buvette, toilettes,
…. Ce problème se posera à pratiquement chaque arrêt ultérieur. Les
3/4 heure prévus sont insuffisants. Raisonnablement il faut prévoir
1heure à 1 heure 30, sans perdre de temps. Sur le plan physique RAS sauf un genou qui me picote (tiens bizarre!). |
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Entre Mortagne et le contrôle suivant de Villaines la Juhel c'est l'inquiétude puis le découragement qui s'installe. Les tendinites sont de retour, et de plus en plus douloureuses. A ce rythme là je n'irai pas au bout, c'est une certitude. J'ai d'ailleurs du mal à suivre le groupe dans les côtes. |
Le
jour s'est levé et rien ne va plus. Je ne peux plus marcher. J'envisage sérieusement
d'abandonner et rebrousser chemin avant d'être trop loin. Je
vais au stand de la Croix Rouge et consulte le médecin. Celui ci
m'indique pouvoir apaiser la douleur via un massage (au Ketum, produit à
retenir !) qu'il faudra renouveler à chaque arrêt. Il me faut aussi
rouler sans forcer. J'utilise aussi les anti inflammatoires que m'avait
prescrit préventivement le médecin traitant avant le départ, et du
daffalgan pour calmer la douleur. Avec tout ça je n'ai pas eu, ni le temps, ni l'envie, de me restaurer. Je laisse les trois quart de mon plateau repas.
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Et
puis il y a tous ces vélos spéciaux. Tandems, Triplette, Patinette, vélos
couchés, carénés, parfois en tandem. Ce sont majoritairement des
Anglo-saxons. On connaît leur tendance à ne pas faire les choses comme
les autres. On se dit avant le départ qu'il ont un grain de folie. Mais au fil des kilomètres ils sont toujours là. On les double dans les ascensions, ils nous redoublent dans les descentes et sur le plat. Les vélos couchés sont impressionnants. Certains avancent à près de 80 km/h dans les descentes. Ca n'a l'air ni maniable ni confortable, mais un français, adepte de ces montures, nous affirme le contraire, et que c'est sans comparaison avec un vélo traditionnel. |
Cela
fait 445 km et près de 24 heures que nous roulons. Dans
mes prévisions, j'avais envisagé de m'arrêter ici pour dormir, mais Guy
avait fait un autre planning qui nous emmène jusqu'à Carhaix
(Contrairement à moi qui avait découpé l'épreuve en 3 parties équitable,
guy préfère réaliser de plus grandes distances au début et finir plus
calmement). |
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Guy
est un ancien cheminot, conducteur de TGV, à la retraite. Peut être à
t'il gardé l'obsession de la ponctualité. Il a sans doute raison,
d'autant plus quand on est en groupe. Je me fais rappeler à l'ordre à
cause d'un massage prolongé et d'un médecin un peu bavard. Personne ne
peut se permettre de faire attendre les autres à chaque arrêt. |
Nous
voici à mis parcours, plus que 613 km ! Et plus d'autre solution que de
rentrer. Comme
pour les sorties du dimanche matin, chacun a mis un braquet plus important
pour le retour. Le vent favorable, bien que discret, nous y aide. Mais il
reste tout de même 600 Km à faire. Après l'euphorie des premières heures, l'allure s'est stabilisée pour chacun. Des groupes homogènes se sont formés et nous nous joignons à eux en fonction de leur vitesse et de notre état de fraîcheur. |
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Certains
groupes sont bien organisés. Les arrêts des uns et des autres s'y font
de manière concertée (les intéressés prennent le devant, le groupe
ralenti, puis tout le monde se regroupe, pas de temps perdu). Les italiens
(et les italiennes qui n'arrêtent pas de discuter quelle que soit la déclivité
de la route) filent bon train dans la bonne humeur. Les danois et
allemands sont plus appliqués mais toujours là. Ils nous font admirer au
passage le top de la technologie (dérailleur électriques, éclairage
sophistiqué, surpuissant avec dynamo intégrée dans le moyeu avant). L'éclairage,
parlons en, serait l'un des points à améliorer, si rétrospectivement,
je devais recommencer cette épreuve. |
Les
principales difficultés sont passées, il ne reste plus que les monts du
Perche. Chacun de nous sait que c'est pratiquement gagné, sauf accident
ou imprudence. Nous
décidons conformément au planning de Guy de rallier Tinténiac pour y
dormir. |
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Sur
la route nous rencontrons le train de "l'US Postal", un groupe
de jeunes américains, dont un tandem. Ce groupe est composé
majoritairement d'étudiantes, venues passer leur vacances en France et
faire le mythique Paris-Brest-Paris (une anecdote à propos des américain:
une américaine a débarqué à Paris sans vélo, et elle a fait un appel
au micro du village accueil la veille du départ, pour qu'on lui prête un
vélo. Ah ces drôles d'américains!). Le
groupe file à vive allure, mon compteur indique 35 Km/h derrière le
tandem (C'est l'un des moments de défoulement). En plus ils trouvent le
loisir de chanter à tue tête "au clair de la lune" et "frère
Jacques". Dans la nuit noire l'ambiance et bon enfant, et leur exubérance
est visible jusqu'à leur accoutrement : ils sont éclairés comme des
sapins de Noël, avec des ampoules jusqu'au sommet du casque. L'arrivée à Tinténiac se fait dans la bonne humeur. |
Nous
nous arrêtons pour dormir. Le
dortoir est un pensionnat d'école constitué de chambres de 4 places
chacune. C'est beaucoup plus silencieux qu'à Carhaix. Mais il nous faut
attendre 45 minutes que des lits se libèrent. Guy
et Loïc se chamaillent sur l'heure du départ. 7H30, 8heures. Je propose
7h45 pour tempérer les esprits. Nous
repartons le lendemain. La journée doit être tranquille avec un peu
moins de 250 km à faire. Nous passons tranquillement les contrôles de Fougères, Villaines et Mortagne à 10h04, 15h16, et 20h13.
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Notre
groupe se sépare. Loïc qui vient de réaliser 80 km seul devant, décide
de rentrer directement pour en finir au plus tôt (il sait qu'il ira au
bout). Anne-Marie en fait de même peu de temps après, elle est
visiblement sur les nerfs car depuis 3 jours nous la sollicitons, parfois
un peu brutalement, pour qu'elle roule avec nous, de manière régulière,
et non 100 mètres devant ou derrière comme elle a l'habitude de le faire
(Guy avait peur d'attraper un torticolis à force de la chercher!). Quoi
qu'il en soit nous terminerons notre Paris-Brest-Paris à deux, conformément
au planning prévu, mais assez déçus sur le moment, du comportement de
nos deux autres compères. La nuit se passe à nouveau dans un immense dortoir de 200 places. A défaut d'y dormir on s'y repose 4 heures.
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Nous repartons au petit matin. La nuit est fraîche en Bretagne. Il y a de la rosée sur les bords de route. Le pull, le coupe vent et les jambières suffisent à peine à me réchauffer. Nous passons les collines du Perche sans encombre. Au passage nous faisons une petite erreur de parcours qui nous pénalise d'une dizaine de km, malgré un parcours toujours bien fléché. |
La fin de parcours n'est qu'une formalité. Je me met dans la roue de Guy, le TGV, et nous rentrons à bonne allure jusqu'à Nogent le Roi. |
Le
retour à st Quentin se fait comme pour l'aller sous les applaudissements
du public. A défaut d'un exploit sur le temps réalisé, nous mettons un point d'honneur, pour terminer en moins de 85 heures, et notre dernier contrôle est enregistré à 10H58 ce qui nous fait donc un total de 84h58.
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Tableau récapitulatif des passages aux contrôles :
lieu | total | partiel | vitesse | durée | arrivée | arrêt | départ | ||
Lundi | St Quentin | 0 | 0 | 25 | 0.00 | 22:00 | 00:00 | 22:00 | |
Mardi | Mortagne | 141 | 141 | 25 | 5:38 | 3:38 | 01:15 | 4:53 | |
Villaines | 221 | 80 | 25 | 3:12 | 8:05 | 01:14 | 9:19 | ||
Fougères | 300 | 79 | 23 | 3:26 | 12:45 | 00:58 | 13:43 | ||
Tinteniac | 360 | 60 | 23 | 2:37 | 16:20 | 00:30 | 16:50 | ||
Loudeac | 445 | 85 | 23 | 3:42 | 20:32 | 01:36 | 22:08 | ||
Mercredi | Carhaix | 522 | 77 | 20 | 3:51 | 1:59 | 05:20 | 7:19 | |
Brest | 613 | 91 | 21 | 4:20 | 11:39 | 00:57 | 12:36 | ||
Carhaix | 696 | 91 | 24 | 3:48 | 16:24 | 00:58 | 17:22 | ||
Loudeac | 773 | 77 | 23 | 3:21 | 20:43 | 01:21 | 22:04 | ||
Jeudi | Tinteniac | 858 | 85 | 20 | 4:15 | 2:19 | 05:13 | 7:32 | |
Fougeres | 918 | 61 | 24 | 2:33 | 10:05 | 1:27 | 11:32 | ||
Villaines | 998 | 79 | 21 | 3:46 | 15:18 | 01:17 | 16:35 | ||
Mortagne | 1078 | 80 | 22 | 3:38 | 20:13 | 07:23 | 3:36 | ||
vendredi | Nogent | 1175 | 97 | 23 | 4:13 | 7:49 | 00:46 | 8:35 | erreur parcours + 13 km |
St Quentin | 1232 | 57 | 24 | 2:23 | 10:58 | 00:00 | 10:58 | MAXI 16:00 | |
total vélo: | 54H 43min | total arrêt: | 30H 15min | Total PBP: | 84H 58min |
L'APRÈS
PARIS-BREST-PARIS
Cette
expérience sera un excellent souvenir que l'on ne peut oublier.
Sur
le plan physique, mis à part l'épisode de la tendinite récurrente, tout s'est
bien passé y compris la récupération. Plus facile que je l'imaginai, je
n'aurais finalement jamais puisé dans mes réserves, juste un peu de lassitude
au retour du coté de Carhaix.
Le
plus dur est donc bien toute la préparation qui précède cette épreuve.
Sur
l'épreuve et son ambiance, il faut noter une parfaite organisation avec des bénévoles
disponibles 24H/24 (un merci au passage à la Croix Rouge, sans qui cette
conclusion ne serait sans doute pas la même).
Les spectateurs ont été omniprésents aux contrôles, sur les bords de routes, le jour et parfois tard la nuit (je n'ai jamais rencontré une telle ferveur dans les manifestations de masse auxquelles j'ai participé). |
L'ambiance
au sein du peloton a été exceptionnelle, chacun étant plongé dans la même
galère, et ce malgré nos différentes nationalités.
J'en
ai fini pour ce récit.
Merci à tous ceux qui m'ont accompagné au cours de ce Paris-Brest-Paris
en particulier à Guy qui aura souvent été notre locomotive et régulateur y
compris au cours des Brevets. Une pensée aussi à ceux qui n'ont pu mener leur
objectif à terme, en particulier
à Henri de Niort, et à notre unique tandem Deux-Sévrien.
Merci à ceux qui sont allés au bout de la lecture, dont le seul objectif
est de conserver une trace
personnelle de cet événement.
Patrick Maïques |